Récit de course Trail du Bourbon 2021 :

23 octobre 2021 , 21h, à Cilaos, prêt à prendre le départ du Trail du Bourbon 105km , 6150m D+ :
pas de grosses sorties trail en prépa, mais un mix de triathlons, courses, run and bike et enchainements de côtes, me permet d'arriver
en forme et confiant pour affronter cette épreuve du Grand Raid de la Réunion.
Sans trop savoir pourquoi, un énorme stress m'envahit les quelques heures avant la course, il disparaîtra dès le départ donné.

On sort de Cilaos, une première montée et redescente tranquille pour se mettre en jambes et au km 6,5, nous voici au pied du sentier du Bloc,
qui mène au refuge du Piton des neiges, on rentre dans le vif du sujet : 3,4km pour 1100m de D+, une petite soupe au sommet pour se réchauffer et une longue descente
technique direction HellBourg, environ 11km pour 1400 D-, alternance de roches, racines, humide sur le 2ème partie : bref on est à la Réunion, c pas de l'autoroute !
Au ravito de Hellbourg, certains organismes sont déjà bien entamés, et on voit déjà des abandons
: pour ma part çà va encore pas mal, même si c vraiment costaud comme entame de course :bcp plus violent que le début de la diag.
Je continue ma progression dans l'ascension vers Plaine des merles, le début n'est pas trop difficile, mais la pente s'accentue sur la fin,
le jour se lève, le paysage est magnifique, très verdoyant pour ces derniers km dans le cirque de Salazie.
Un pause un peu plus est nécessaire pour que je récupère bien avant de partir à l'assaut de Mafate.

La chaleur commence à être bien présente au moment où je rentre dans le cirque de Mafate, mais émerveillé par ces paysages, le moral est toujours au beau fixe, je traverse la plaine des Tamarins,
puis je monte direction Marla : je prends du temps pour récupérer, je me change, puis me ravitaille. A ce moment j'entends des bénévoles dire qu'il n'y plus d'eau
à Roche Plate la prochaine étape : vu la température, je suis inquiet car au coeur du Cirque la température ressentie est supérieure à 40 degrés.

J'essaie de gérer mes réserves d'eau mais la chaleur est écrasante, très peu de passages ombragés, à sec rapidement, pas d'autre choix que de boire l'eau de la rivière quand nous la traversons.

Arrivé à Roche Plate km52,6 déjà bien rôti, il n'y a effectivement plus d'eau, mais par chance au bout de qq minutes un hélicoptère attendu depuis qq heures vient ravitailler.
Il faut ensuite affronter La Brèche, c'est la montée qui mène au sentier du Maïdo normalement, mais cette année il est impraticable, donc direction l'Ilet des Orangers,
je commence à bien souffrir, et une très longue descente entrecoupée de sévères remontées nous attend : les pauses s'enchainent j'ai de plus en plus de mal à progresser,
de moins en moins lucide, je m'arrête, je mange une barre de céréale , un gel, mais, je me sens très faible.
J'avance comme je peux jusqu'à la Rivière de Galets, le ravitaillement est proche.
Alors que la nuit tombe j'aperçois les tentes du ravito, il me reste 500m, et là d'un coup, je suis arrêté net, vomissements, vertiges.
Je n'arrive plus à avaler même une goutte d'eau, je décide d'essayer de dormir sur le poste de Deux-Bras après 68km et 4300mD+, j'arrive à m'endormir, je ne sais pas trop combien
de temps, 30min - 1h ? je suis réveillé par mon estomac qui a décidé de se tordre dans tous les sens.
J'attends un peu , j'essaie de remanger ou boire, çà ne passe pas. Je change de chaussures, je me remets debout : la tête qui tourne, je ne sais pas trop quoi faire.
Je ne suis plus très lucide : à ce moment là j'ai peur de m'engager dans la montée de Dos d'âne et surtout la descente qui suit, j'ai l'impression de ne pas maîtriser la situation.
Je décide d'abandonner ici par peur de prendre des risques et aussi parce que la balade s'était transformée en enfer depuis 3-4 heures.

Avec quelques jours de recul j'ai quand même des regrets, car j'avais une marge importante sur la barrière horaire , il me restait 21h pour rallier l'arrivée 36 km plus loin.
J'aurais du patienter plus longtemps avant de jeter l'éponge : çà n'aurait peut-être pas suffi ,mes maux d'estomac ont continué jusqu'au lendemain matin après une nuit à l'hôtel.
Bref, facile à dire après coup, mais sur le moment, n'étant plus lucide, j'ai certainement flippé : un peu livré à moi-même, certainement pas le même mental qu'en 2015, l'aventure s'est arrêtée là, parmi les 33% d'abandons (plus que sur la diag cette année)

Malgré tout, je garderai un énorme souvenir de ce grand raid 2021, la satisfaction d'avoir traversé les 3 cirques Réunionnais dans une même journée, surtout Mafate, dans lequel j'ai vécu l'enfer au paradis !

Est-ce que je retenterai l'aventure ? trop tôt pour répondre, mais tout est possible !